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Philosophie des Sciences...

Pour les sciences de la population, dont la démographie fait partie, nous avons dégagé les différents paradigmes qui les ont dirigées au cours du temps. Selon le paradigme transversal, les événements connus à un moment donné sont indépendants des individus et peuvent être expliqués par différentes caractéristiques économiques, politiques, religieuses et sociales de la société dans laquelle ces individus vivent, indépendamment du lieu ils se trouvent. La figure suivante illustre la probabilité de migrer des agriculteurs en Norvège, en fonction de la proportion d'agriculteurs dans chaque région. Si le paradigme est vérifié, cet exemple semble montrer que la probabilité d'émigrer des agriculteurs est beaucoup plus élevée que celle des autres professions.Selon le paradigme longitudinal, l'objectif est d'étudier l'arrivée d'un seul événement, pendant la vie d'une génération ou d'une cohorte, dans une population qui garde les mêmes caractéristiques aussi longtemps que dure le phénomène. Comme sous le paradigme transversal, la population doit être considérée comme homogène et les phénomènes comme mutuellement indépendants.Le paradigme biographique va considérer que, tout au long de leur vie, les individus suivent une trajectoire complexe qui dépend à chaque instant de leur histoire de vie passée et de toutes les informations qu'ils ont acquises dans le passé. La population devient alors hétérogène et les phénomènes étudiés vont devenir interdépendants. La figure suivante, extraite de la même étude, montre que sous ce paradigme, la probabilité d'émigrer des agriculteurs est beaucoup plus faible que celle des autres professions, en contradiction avec le modèle transversal. Nous verrons que le paradigme suivant permet de résoudre ce problème.Le paradigme multiniveau va au-delà de l'opposition entre le holisme du paradigme transversal ou longitudinal et l'individualisme méthodologique de l'approche biographique, en disant que l'on ne peut comprendre les comportements humains qu'en tenant compte des différents niveaux d'agrégation en jeu. La figure suivante, portant toujours sur le même exemple, porte les probabilités de migrer des agriculteurs et des autres en fonction du pourcentage d'agriculteurs.On voit d'abord que le résultat biographique est toujours vérifié, mais que la plus forte probabilité de migrer selon la proportion d'agriculteurs est en fait liée aux autres professions, montrant que le paradigme transversal est ici non vérifié. La probabilité de migrer de ces autres professions n'est plus indépendante de la zone elles vivent.Cela vient confirmer l'idée de Gilles-Gaston Granger in Formes, opérations, objets (1994) que :Le fait humain ne peut certes être scientifiquement connu qu'à travers une pluralité de géométrals, mais à la condition toutefois que soit découverte l'opération contrôlable qui le restitue à partir d'eux stéréoscopiquement."Il est cependant nécessaire de dépasser ces différents paradigmes pour mettre en place une axiomatique qui affermirait le statut scientifique de la discipline. Il est d'abord utile de dire que le trio fécondité, mortalité et migration, est l'objet scientifique des sciences de la population et qu'il constitue une première étape de cette axiomatisation. Il s'agit maintenant de trouver la forme des transformations quantitatives qui permettront de mieux fournir les conditions générales sans lesquelles les phénomènes à expliquer ne seraient pas ce qu'ils sont. Les sciences de la population s'en trouveraient renforcées
Paradigmes et axiomes
L'objet spécifique et scientifique d'une discipline n'est pas défini explicitement dès ses débuts. Les sciences comme la physique et la biologie, par exemple, évoluent comme une série d'explications successives de leur objet, ainsi que le passage de la physique newtonienne à la théorie de la relativité générale d'Einstein. De la même façon l'objet des sciences sociales va évoluer au travers de différents paradigmes, qui vont décrire les divers types de relations entre les phénomènes observés et leur objet scientifique.
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Pour les sciences de la population, dont la démographie fait partie, nous avons dégagé les différents paradigmes qui les ont dirigées au cours du temps. Selon le paradigme transversal, les événements connus à un moment donné sont indépendants des individus et peuvent être expliqués par différentes caractéristiques économiques, politiques, religieuses et sociales de la société dans laquelle ces individus vivent, indépendamment du lieu ils se trouvent. La figure suivante illustre la probabilité de migrer des agriculteurs en Norvège, en fonction de la proportion d'agriculteurs dans chaque région. Si le paradigme est vérifié, cet exemple semble montrer que la probabilité d'émigrer des agriculteurs est beaucoup plus élevée que celle des autres professions.Selon le paradigme longitudinal, l'objectif est d'étudier l'arrivée d'un seul événement, pendant la vie d'une génération ou d'une cohorte, dans une population qui garde les mêmes caractéristiques aussi longtemps que dure le phénomène. Comme sous le paradigme transversal, la population doit être considérée comme homogène et les phénomènes comme mutuellement indépendants.Le paradigme biographique va considérer que, tout au long de leur vie, les individus suivent une trajectoire complexe qui dépend à chaque instant de leur histoire de vie passée et de toutes les informations qu'ils ont acquises dans le passé. La population devient alors hétérogène et les phénomènes étudiés vont devenir interdépendants. La figure suivante, extraite de la même étude, montre que sous ce paradigme, la probabilité d'émigrer des agriculteurs est beaucoup plus faible que celle des autres professions, en contradiction avec le modèle transversal. Nous verrons que le paradigme suivant permet de résoudre ce problème.Le paradigme multiniveau va au-delà de l'opposition entre le holisme du paradigme transversal ou longitudinal et l'individualisme méthodologique de l'approche biographique, en disant que l'on ne peut comprendre les comportements humains qu'en tenant compte des différents niveaux d'agrégation en jeu. La figure suivante, portant toujours sur le même exemple, porte les probabilités de migrer des agriculteurs et des autres en fonction du pourcentage d'agriculteurs.On voit d'abord que le résultat biographique est toujours vérifié, mais que la plus forte probabilité de migrer selon la proportion d'agriculteurs est en fait liée aux autres professions, montrant que le paradigme transversal est ici non vérifié. La probabilité de migrer de ces autres professions n'est plus indépendante de la zone elles vivent.Cela vient confirmer l'idée de Gilles-Gaston Granger in Formes, opérations, objets (1994) que :Le fait humain ne peut certes être scientifiquement connu qu'à travers une pluralité de géométrals, mais à la condition toutefois que soit découverte l'opération contrôlable qui le restitue à partir d'eux stéréoscopiquement."Il est cependant nécessaire de dépasser ces différents paradigmes pour mettre en place une axiomatique qui affermirait le statut scientifique de la discipline. Il est d'abord utile de dire que le trio fécondité, mortalité et migration, est l'objet scientifique des sciences de la population et qu'il constitue une première étape de cette axiomatisation. Il s'agit maintenant de trouver la forme des transformations quantitatives qui permettront de mieux fournir les conditions générales sans lesquelles les phénomènes à expliquer ne seraient pas ce qu'ils sont. Les sciences de la population s'en trouveraient renforcées
Paradigmes et axiomes
L'objet spécifique et scientifique d'une discipline n'est pas défini explicitement dès ses débuts. Les sciences comme la physique et la biologie, par exemple, évoluent comme une série d'explications successives de leur objet, ainsi que le passage de la physique newtonienne à la théorie de la relativité générale d'Einstein. De la même façon l'objet des sciences sociales va évoluer au travers de différents paradigmes, qui vont décrire les divers types de relations entre les phénomènes observés et leur objet scientifique.